Les livres recommandés par vos bibliothécaires - 19
Estelle a apprécié cette histoire de vampires aux protagonistes attachants. Chantal s'est laissée emporter dans ce roman où la nature est au premier plan. Amélie vous recommande le nouveau roman de Fabrice Caro qui, avec humour, met en avant les petits travers de ses personnages... qui sont aussi les nôtres ! Clémentine a été touchée par cette oeuvre singulière aux sonorités envoutantes qui nous emmène aux côtés d'une jeune femme musulmane, croyante et lesbienne. Catherine a aimé ce roman sur le monde ouvrier où les enfants aspirent à une meilleure vie que leurs parents. Ester a été séduite par un roman exigeant au goût âpre.
Sœurs de sang / Richelle Mead
Par Estelle, bibliothèque de Saint-Martin d'Hères
Divertissant et entrainant
Les histoires de vampire sont légion depuis les années 2010 et la parution de Twiilight, à en devenir un peu lassant. Pourtant la mythologie développée dans celui-ci m’a bien plu, avec différentes castes de vampires ayant chacune un rôle bien précis.
Mais bien qu'ils soient des vampires, les dhampir et les moroï présents à l'académie sont avant tout des adolescents : rumeurs, clans, histoires d'amour plus ou moins heureuses sont au rendez-vous. L'intrigue principale du livre vient se superposer à ces histoires d'adolescents d'une manière intelligente. Il y a une dimension politique, avec des luttes d’influence, et une dimension morale.
L'ensemble donne une histoire très agréable à suivre et intéressante. Les personnages créés par Richelle Mead sont particulièrement réussis, très attachants. Le premier tome de cette saga est donc très plaisant à lire et amorce une intrigue qui promet d'être palpitante.
Il ne faut pas en attendre de la grande littérature, mais c'est un excellent divertissement et je vous conseille volontiers cette lecture ! A découvrir à partir de 14 ans.
Nord-Est / Antoine Choplin
Par Chantal, bibliothèque d'Echirolles
Que serait le but sans observer le chemin qui nous y mène et y puiser des réponses ?
Les plaines du Nord-Est : mythe ou réalités inatteignables ? Lorsque les portes du camp s'ouvrent enfin et sans attendre d'hypothétiques camions qui ralentiront son départ, Garri se lance dans l'aventure, accompagné par trois hommes.
Armés de leur confiance en Garri et de leur persévérance à vaincre les difficultés et les drames, ils apprendront des expériences des uns des autres et bientôt Tayna se joindra à leur petit groupe. Lorsqu'ils arrivent enfin au pied des montagnes à franchir avant de basculer vers les plaines tant espérées, chaque membre de l'expédition devra puiser dans sa propre quête pour apporter de la force au collectif. L'avenir ne s'écrira peut-être plus comme ils l'avaient tous imaginé...
Antoine Choplin nous entraîne, à la suite de ses personnages, dans des décors majestueux qu'il décrit avec une telle précision que vous ressentirez la rudesse des cailloux, la fraîcheur de la brise ou du cours d'eau, la difficulté d'un surplomb, la majesté d'un sommet embrasé par le feu du soleil, la beauté des jours et des nuits qui accompagnent avec constance nos quêtes quotidiennes ou les plus extrêmes.
Le minéral et le végétal font partie intégrante de ce périple original dans lequel il est aussi question de migrations, de résistances, de transmissions.
Broadway / Fabrice Caro
Par Amélie, bibliothèque de Vif
Le tourbillon de la vie
Axel, c'est nous quand notre cerveau s'emballe et imagine des histoires sans queue ni tête, quand on aimerait dire "non" et qu'on s'entend dire "oui" (tout en se maudissant intérieurement et se jurant que la prochaine fois on fera mieux - Haha), quand on s'enferme dans un rôle. Axel, en patinage artistique, c'est un saut suivi d'une rotation et cela colle plutôt bien avec notre personnage pris dans un tourbillon (avec comme éléments déclencheurs une lettre de l'Assurance maladie et un dessin de son fils).
À travers l'humour, le roman aborde les difficultés d'être parent d'adolescents, de trouver sa place et cette envie d'aller voir ailleurs en se rendant compte que la vie avance et qu'on a l'impression de rester sur place.
Fabrice Caro reprend les mêmes ingrédients que dans Le Discours : un narrateur dépassé par ses pensées, peu sûr de lui, qui s'emballe, se piège lui-même. Dans ses romans comme dans ses BD, il met en avant nos petits travers, nos névroses : un régal.
En cette période bancale, triste, l'absurdité de cette histoire est une bulle d'air.
La petite dernière / Fatima Daas
Par Clémentine, bibliothèque Arlequin de Grenoble
Elle s'appelle Fatima
Entre monologue et poème en prose, Fatima Daas, écrit sur la quête identitaire d’une jeune femme musulmane, croyante et lesbienne. Elle est la petite dernière d’une famille franco-algérienne vivant à Clichy-sous-Bois. Elle est asthmatique et ses parents auraient possiblement préféré qu’elle soit un garçon. La jeune femme se cherche comme elle cherche son air.
Fatima Daas propose une œuvre littéraire singulière et remarquable par sa forme. Son texte, ponctué d’arabe, fait de phrases courtes, de blancs et de répétitions, joue avec les sonorités et le rythme. Il y a de la musicalité dans ce court roman et de l’émotion. Comme un morceau de musique qui nous envoûte, il donne envie d’y revenir et de le relire.
A 25 ans, Fatima Daas a certainement un bel avenir littéraire devant elle.
Les Nuits d'été / Thomas Flahaut
Par Catherine, bibliothèque Centre-Ville de Grenoble
Et leurs enfants après eux
Comme beaucoup de Jurassiens, Thomas et Mehdi sont intérimaires en Suisse. Ils n’ont pu éviter l’usine comme le rêvaient leurs pères qui s’y sont usés avant eux. Louise, la sœur de Thomas, a choisi comme sujet de thèse : les ouvriers frontaliers. Comme quoi, difficile d’échapper à l’héritage social. Au cours de l’été, l’usine va être délocalisée, les machines démontées. A travers les témoignages de ces ouvriers, Louise va restituer ce monde en train de disparaître.
Après Ostwald, son premier roman où il était déjà question du monde ouvrier, Thomas Flahaut s’est inspiré de son expérience personnelle, pour dépeindre le monde de l’usine moderne : machines de plus en plus sophistiquées, vocabulaire aseptisé, précarisation des emplois, fermetures ou délocalisations. Il décrit précisément les gestes mécaniques qu’il faut pour produire, la fatigue des corps, l’usure au fil des ans, le travail de nuit qui déphase ceux qui y sont soumis. Heureusement, il reste l’amitié, l’amour, les fêtes autour d’un feu, et les trajets à moto pour se sentir libre et vivant.
Dans une écriture délicate et épurée, Thomas Flahaut restitue les rêves et le désenchantement d’une génération qui aspire à une vie meilleure et qui se cherche une identité propre.
Buveurs de vent / Franck Bouysse
Par Ester, bibliothèque d'Echirolles
Il était une fois Le Gour Noir
Buveurs de vent plante son décor dans la vie d'une famille qui vit dans une vallée nichée entre deux versants de montagne et une rivière "le Gour Noir"; juste en amont on trouve le viaduc, la centrale et sa petite ville qui porte le nom de son fondateur et maître absolu Joyce.
Nous sommes dès le prologue immergés dans des temps qui semblent immémoriaux et, comme souvent avec Franck Bouysse, nous ignorons tout de la localisation de ce bourg, subtilité voulue pour laisser place à notre imaginaire de le récréer. Une topographie exacte nous installe cependant dans le réel des personnages qui animent admirablement ce récit.
Tout d'abord les quatre frères et sœur, Marc qui trouve dans les mots la seule raison d'exister en dépit de l'interdiction stricte du père de lire, Mathieu en communion et en perpétuel dialogue avec la nature environnante, Mabel d'une beauté irrévérencieuse aussi perspicace qu'indépendante et Luc l'enfant "débile" qui vit dans le monde de l'Ile au Trésor et qui voue une vraie dévotion à sa sœur. Tous sont des enfants puis des jeunes adultes épris de liberté, vivant du souffle impérieux que leur destinée leur impose. Les parents, Martha pétrie de bondieuseries et Martin taciturne effacé devant la mère et qui ne voit pas d'autre moyen d'éduquer ses enfants qu'en les battant.
Viennent ensuite tous les personnages qui gravitent autour et qui élargissent comme des cercles concentriques l'histoire : Joyce arrogant et mystérieux fondateur de cette ville où chaque rue porte son nom, ses deux sous-fifres le nain Snake et le géant Double et Gobbo, figure émancipatrice du récit, marin en cale sèche dans ce village de montagnards.
Véritable western rocailleux Buveurs de vent démarre lentement, un prologue suivi d'une prose qui pose ses petits cailloux avec précaution, une rivière tranquille qui grossit au fur et à mesure que les protagonistes se découvrent à eux-mêmes.
Déjà séduite par son roman précédent Né d'aucune femme j'avais hâte de découvrir le nouveau roman de Franck Bouysse. Je n'ai pas été déçue. Ici encore la langue déployée par l'auteur est enchanteresse, ici encore nous nous faisons emporter par un conte cruel et magnifique.
Un roman exigeant aussi, j'avoue avoir laissé "décanter" avant d'en apprécier sa saveur âpre et limpide qui ne m'a que conforté dans mon envie de le partager avec vous !