Rose a 29 ans et un projet : quitter la France pour "retourner en Noirie". Quand Matthieu Bareyre, l'un de ses plus proches amis, lui propose de faire un film avec elle inspiré de son journal intime, ils y voient l'occasion rêvée de régler des comptes. Il est des films pas tout à fait ordinaires, peu aimables, déréglés et excessifs, qui nous dérangent, nous bousculent. Journal d’une femme nwar fait partie de ceux-là. Ce film est une bourrasque à l’instar de Rose-Marie Ayoko Folly, co-autrice du film et personnage central de ce portrait. Matthieu Bareyre l’a rencontrée en 2016 Place de la République, à Paris, pendant le tournage de L'Époque, une œuvre sur le mouvement Nuit debout, dont Rose est devenue rapidement l’une des figures. Comme dans un spin-off, Matthieu centre son nouveau projet exclusivement sur la jeune femme. Elle se présente “façon BFM” avec un sens aigu de la punchline, de la caricature et du second degré : ”Madame Rose-Marie Ayoko Folly, jeune toxicomane de luxe et bipolaire à tendance très maniaque agresse des officiers de police dans ses épisodes maniaques”. Rose va bel et bien nous parler, et ce, de manière très directe, de sa santé mentale, de son passé et du racisme en France, les trois lui causant amertume et souffrance. Vaste programme concentré dans un portrait éclatant et percutant. Dans un flot quasi ininterrompu de parole, Rose s’adresse à nous, les Français, les Blancs, ceux qui l’ont trahi et déçue. Ce faisant, elle transmet aussi ses élans, son goût des mots, du rap (Damso, Bouba) et de la littérature (Audre Lorde…). Elle parle et clashe tout le temps avec tout le monde et surtout avec Matthieu, caché derrière sa caméra ou son téléphone, réceptacle de sa parole servant à la fois de punching ball et de soutien indéfectible. Par souci de réciprocité, ce dernier se dévoile à son tour en soulignant leur différences de genre, d’origine sociale, d’éducation et … de couleur de peau. Rose est fatiguée. D‘être constamment en colère et de combattre les contradictions d’une République qui se voudrait apaisée mais renie son multiculturalisme et son passé colonial. Son irrépressible vitalité conduit le portrait parfois jusqu'à d’incandescents états de grâce. Amis malgré tout ce qui les sépare, Rose et Matthieu s’entraident à trouver de la lumière dans le marasme de l’époque.
- Année de production
- 2023
- Durée
- 01h44