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Vivre avec les hommes. Réflexions sur le procès Pelicot
Livre
Edité par Climats. Paris cedex 13 - 2025
« Je suis philosophe, je m’intéresse aux rapports entre les femmes et les hommes : après un premier livre sur la soumission des femmes aux hommes, j’ai écrit un ouvrage sur le consentement et les injustices de genre dans la sexualité hétérosexuelle. Je suis aussi une femme de bientôt quarante ans, qui voudrait pouvoir exister dans le monde sans s’inquiéter sans cesse des violences sexistes et sexuelles dont mes amies, mes filles ou moi pourrions être victimes. J’ai vu les changements apportés par le mouvement #MeToo, je vois le backlash masculiniste qui s’efforce de renvoyer les femmes à leur position de deuxième sexe. Lorsque je découvre les crimes commis sur Gisèle Pelicot, je sais que se condensent dans cette histoire toutes les questions philosophiques qui sont les miennes. J’hésite à aller au procès de Mazan. Puis je me rends à l’évidence : il me faut écrire ce procès et l’expérience que j’en fais, comme philosophe et comme femme. Et tenter de répondre à cette question qui me hante : peut-on vivre avec les hommes ? »
- Classification
- Histoire - Géographie ; Faits de société ; International
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La banalité du mâle ?
S’étant intéressée à la soumission et au consentement dans les rapports entre les femmes et les hommes, la philosophe Manon Garcia ne pouvait passer à côté du procès de Mazan. Procès durant lequel, rappelons-le, Dominique Pelicot et une cinquantaine de complices retrouvés auront été jugés pour avoir violé sous soumission chimique Gisèle Pelicot, inconsciente. Pendant dix ans. Au-delà de la violence ahurissante des faits, ce qui va sidérer l’autrice est tout à la fois la diversité des profils des accusés ainsi que leur banalité. Diversité dans le sens où ces hommes proviennent de situations sociales et familiales très différentes. Banalité, car ils ne sont a priori pas des monstres. Pour beaucoup, ce sont des pères de familles, des personnes comme vous et moi. Vertige. A l’instar d’Hannah Arendt quand elle suivît le procès d’Adolf Eichmann, Manon Garcia – en réfléchissant à cette comparaison au début de son livre – se rend compte qu’elle a devant elle des hommes qui ne « pensent pas ». C’est en ça que leur monstruosité ne vient pas du fait qu’ils « penseraient mal », mais bien qu’ils ne « pensent pas ». Banalité du mal, on y revient. A partir de là, une question démesurée – oui : à la démesure du… vertige ! – et si excessive qu’elle en mérite le titre de ce livre : peut-on « vivre avec les hommes » ? On ne pourra qu’être déçu si l’on attend de Manon Garcia des réponses claires à cette question. Mais cet essai est l’occasion pour elle de rappeler la nécessité de transformer en profondeur notre société. S’il n’est évidemment pas question pour elle de nier en pareille situation la responsabilité individuelle de chacun des accusés, l’autrice nous montre que, s’ils sont les fruits pourris de l’arbre, c’est aussi que l’arbre est sacrément atteint.
Christophe, bibliothèque de Varces - Le 08 avril 2025 à 10:45