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Printemps du livre 2023

Affiche du Printemps du livre 2023
Affiche du Printemps du livre 2023

La 21ᵉ édition du Printemps du livre s'est déroulée du 29 mars au 5 avril 2023.

 

Organisé par la ville de Grenoble et porté par la bibliothèque municipale, le festival accueille une trentaine d’autrices, d'auteurs et d'artistes qui viennent à la rencontre des publics. Pendant une semaine, Le Printemps du livre se déploie dans les bibliothèques de Grenoble et de l'agglomération et dans de nombreux lieux associés pour proposer des rencontres, des lectures, des débats, des spectacles et des expositions pour tous les âges.

 

Cette sélection numothèque vous permet d'accéder directement aux ouvrages des auteurs et autrices invités.

 

Pour plus d'information, consultez le site du Printemps du livre.

 

Les avis des bibliothécaires sur les livres des auteurs et autrices présents au Printemps du livre

Le cœur ne cède pas / Grégoire Bouillier

Le coeur ne cède pas

Par Capucine, bibliothèque Teisseire Malherbe de Grenoble
Une enquête foisonnante

Parti d’un réel fait divers, une mannequin qui s’est laissée mourir de faim en 1986 à Paris, Grégoire Bouillier se fait détective et mène une enquête passionnante pour tenter d’éclaircir les circonstances de ce drame. L’enquête se ramifie et part dans des directions multiples. L’auteur nous prend et ne nous lâche plus, tirant un fil entre ce suicide et sa propre histoire.

Loin d’être déprimant, loin d’être une épreuve de lire ces 900 pages, c’est un récit facile à lire, avec beaucoup d’humour, et une profonde humanité.

Un roman que seul Internet pouvait permettre d'écrire. Un énorme coup de cœur

 

Parti d’un réel fait divers, une mannequin qui s’est laissée mourir de faim en 1986 à Paris, Grégoire Bouillier se fait détective et mène une enquête passionnante pour tenter d’éclaircir les circonstances de ce drame. L’enquête se ramifie et part dans des directions multiples. L’auteur nous prend et ne nous lâche plus, tirant un fil entre ce suicide et sa propre histoire.

Loin d’être déprimant, loin d’être une épreuve de lire ces 900 pages, c’est un récit facile à lire, avec beaucoup d’humour, et une profonde humanité.

Un roman que seul Internet pouvait permettre d'écrire. Un énorme coup de cœur !

Le coup du fou / Alessandro Barbaglia

Le coup du fou Par Frédéric, bibliothèque Kateb Yacine de Grenoble

Des échecs et des hommes

Alessandro Barbaglia dresse le portrait d’un homme supérieurement intelligent mais totalement inadapté. Sans rien nous cacher de ses zones d’ombre, l’auteur fait de Bobby Fisher un héros. La partie d’échec qu’il livre contre le champion soviétique est un combat homérique non parce qu’il oppose deux représentants des deux grands blocs politiques de l’époque mais par la confrontation de leurs personnalités, la géniale folie de l’un et l’immense talent plus académique de l’autre, marquée par un grand respect mutuel. Leur patrie c’est les échecs et même un lecteur qui ne connait rien à ce jeu est emporté par la restitution de cette partie mythique qui sous la plume de l’auteur acquiert une dimension mythologique. Comme si tout cela ne suffisait pas on est touché par l’histoire intime de Bobby Fischer marquée par la solitude et l’absence, qui par un jeu de correspondances renvoie à la vie de l’auteur avec la mort prématurée de son père.
Le coup du fou est un roman captivant, émouvant, parfois drôle, d’une grande originalité.
 

Par Miquel, bibliothèque de Le Pont-de-Claix

Bobby Fischer sous les murailles de Troie

Le coup du fou commence comme le récit d’un championnat d’échec parsemé d’éléments autobiographiques mais prend rapidement un tournant inattendu en filant une métaphore improbable entre le championnat d’échecs de 1972 et la Guerre de Troie.
Prenons les choses dans l’ordre :
Un : L’auteur, enfant, sous la table estivale entend son père, psychiatre, échanger avec ses amis sur le "cas" Bobby Fischer, des paroles qui ne le quitteront jamais.
Deux : Bobby Fischer, champion américain, affronte lors du championnat du monde d’échecs de 1972 le champion en titre soviétique Boris Spassky. C’est le premier grand affrontement américano-soviétique sur l’échiquier en pleine guerre froide. Entre la personnalité intrigante de Fischer et l’histoire rocambolesque de ce championnat, il y a largement de quoi donner matière à un roman mais l’auteur va plus loin.
Trois : Il voit un lien entre Fischer et le héros grec Achille. Absurde ? Pas tant que ça sous la plume d’Alessandro Barbaglia qui déroule un récit très convainquant.
Sans aucun doute l’une de mes plus grandes découvertes littéraires de 2022. Les échecs sont décidément une bonne matière à littérature.

Qui se souviendra de Phily-Jo ?  / Marcus Malte

Qui se souviendra de Phily-Jo ? Par Miquel, bibliothèque de Le Pont de Claix

Qui se souviendra ?

Marcus Malte est vraiment un auteur improbable. Désormais, chacun de ses romans prend une nouvelle direction imprévue et pourtant on est à chaque fois emporté par le fond et par la forme. Cette fois-ci, on sombre en plein jeu littéraire, après des débuts de thriller un brin curieux, on s’enfonce dans une série de récits enchâssés où l’on passe de Nabokov à League of Legends, de Dallas à Noam Chomsky.

C’est à la fois complexe et drôle, réjouissant et cryptique. L’auteur s’amuse avec l’intertextualité (au sein du roman mais aussi avec ses romans précédents), au risque de nous perdre.

Deux secondes d'air qui brûle / Diaty Diallo

Deux secondes d'air qui brûlePar Pauline, bibliothèque Centre-Ville de Grenoble

Et une vie à faire le deuil

Astro a la vingtaine, la vie devant lui, et pourtant le quartier bien présent sous les yeux, les pieds, la peau. Le quartier, il y vit depuis toujours. Il en connaît les moindres arêtes, toute la géographie, les bâtiments en béton, les lubies d’architectes, les terrains vagues, les pulsations de tous les cœurs qui vivent là. C’est l’été, il fait chaud. Avec les copains, ils improvisent des barbecues sur la place, fauteuils de camping. Les petits tuent le temps en équilibristes sur les motos. Le soir, dans le parking sous la place, on fait la fête au rythme des baffles. C’est la vie, pas si insouciante que ça, mais la vie quand même.

Un soir, un passage de police plus nerveux que d’habitude, toujours aussi injuste, des policiers s’énervent, tirent sur les jeunes ; tuent. Et cette fois, un soulèvement, une vague, comme un adieu, comme un hommage. Pas une révolution qui veut tout casser. Plutôt un tsunami de larmes.

Ce roman bouleversant, réaliste, est à la fois très incarné et choral : on voit à travers les yeux d’Astor, mais celui-ci imagine souvent l’histoire du point de vue des autres. Cette inventivité dans la narration permet de multiplier les ressentis, de plonger sous la peau du quartier, de sentir tout ce qui les lie. L’écriture est très poétique, sous l’influence du slam, du rap ; la musique irrigue le texte. Le discours indirect libre est très présent, les paroles s’intègrent naturellement au récit ; la galerie de personnages est riche et passionnante.

Bref, une lecture marquante, pleine de vie plus que de colère, qui appelle à l’empathie.

 Comme un oiseau dans les nuages / Sandrine Kao

Comme un oiseau dans les nuagesPar Pauline, bibliothèque Centre-Ville de Grenoble

Une histoire des femmes de la famille

Le jour d’une audition de piano très importante, Anna-Mei, 16 ans, panique et défaille. Elle quitte l’audition, persuadée qu’elle l’a ratée et s’effondre. Mars 2020, c’est aussi le début du confinement, et Anna-Mei se retrouve bientôt enfermée chez elle avec son père et sa grand-mère maternelle. Sa mère, d’origine chinoise, est décédée quand elle était encore bébé. Entre Anna-Mei et sa grand-mère, c’est un dialogue qui s’enclenche pour raconter l’histoire des femmes de la famille, une histoire malmenée par le contexte politique en Chine, mais aussi par les maladies mentales. Peu à peu, Anna-Mei comprend, retrace, se confie aussi sur sa vie, et commence le début d’une guérison.

Légende d'un dormeur éveillé / Gaelle Nohant

Légende d'un dormeur éveilléPar Laurence, bibliothèque Centre-Ville de Grenoble

Une fourmi de 18 mètres

Peut-être, enfant, avez-vous appris cette poésie de Robert Desnos ? Mais connaissez-vous la vie de ce grand poète ?

Gaëlle Nohant nous invite à découvrir le Paris d'avant guerre en compagnie bien sur de Robert Desnos mais également de tous ceux qui le côtoyaient : Hemingway, Prévert, Aragon et tant d'autres. C'est également une très belle histoire d'amour (celle de Youki et du poète) mais également celle de la résistance et du sacrifice (Robert Desnos est mort en camp de concentration en 1945).

On referme le livre avec une seule envie : découvrir ou redécouvrir l'œuvre de Robert Desnos.

Le Grand Vertige / Pierre Ducrozet

Le Grand VertigePar Soumia, bibliothèque Kateb Yacine de Grenoble

Face à la terre qui se dérobe

 Le personnage central de ce roman, Adam Thobias, est missionné pour piloter une commission internationale sur l’urgence climatique. Ce personnage reconnu comme grande sommité, à la fois scientifique et romancier, utilise cette mission factice comme couverture pour mettre en œuvre un projet dont la finalité demeure cachée et implique toute une myriade de personnage. Pour les besoins de ce projet, Adam Thobias crée un réseau intitulé Télémaque et s’entoure de plusieurs protagonistes auxquels il distribue rôles et tâches grassement payés.

Il y a tout d’abord Nathan Régnier microbiologiste et spécialiste de la vie des plantes, Thomas Groben virtuose de Google earth, June Demany jeune femme en déshérence, Mia Casal belle anthropologue et Arthur Bailly photographe alcoolique et marginal. Tous sont mis en mouvement par Adam Thobias et voyagent à travers la planète pour satisfaire des attentes très disparates mais qui obéissent à une logique dévoilée à la fin du récit. Pour chacun, Ducrozet brosse un portrait vivant et très incarné.

Tous donnent corps par le caractère romanesque de leur mission, à une épopée environnementale haletante où se mêle réalité et fiction, procédé narratif déjà utilisé par l’auteur dans son livre L’invention des corps, pour rendre encore plus saillant l’horreur écologique. La figure de June se détache de cette galerie de personnages, jeune femme tourmentée et en quête de sens, qui par sa jeunesse incarne la génération dont le futur est mis en péril par l’inaction et l’incurie des hommes. Sa rencontre avec Mia, désignée par Adam Thobias pour la retrouver et la convaincre de participer au réseau Télémaque, se transforme en relation d’amour à la fois très sensuelle et pleine d’humanité, dans un monde toujours plus en état de déliquescence.

Ce livre questionne l’action individuelle et collective face à l’enjeu colossal du saccage environnemental. L’immensité de la tâche peut-elle être à la mesure de simples citoyens juste armés de leur bonne volonté ? Est-ce que l’utopie est un remède ou la déception est-elle au bout du chemin ? La dimension prométhéenne d’une telle visée ne mène-t-elle pas à la folie ? Les meilleures intentions ne portent-elles pas en germe, si l’on y prend garde, une catastrophe encore plus grande ? Et ne serait-il pas déjà trop tard ? Telles sont les questions qui se dégagent pour moi à la lecture de ce roman dense et foisonnant de péripéties et de personnages. Contre toute attente au détour d’une page, Ducrozet se livre à un exposé brillant sur l’histoire du pétrole dont l’intérêt certain fait écho aux ravages géopolitiques et environnementaux dénoncés par le propos.

Un beau livre, riche, bien écrit, vivant, mais dont la construction peine à rendre compte de l’ambition.