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Les livres recommandés par vos bibliothécaires - 46

Femme tenant une liseuse
Image par Perfecto_Capucine de Pixabay

Laurence et Amélie ont aimé le dernier roman de Lionel Shriver à la construction originale. Miquel recommande ce recueil de nouvelles grinçantes parues initialement dans Fluide glacial. Cécile est enthousiaste à la lecture de ce premier tome d'un roman d'aventure. Myriam recommande les aventures d'une jeune princesse détective pour les 9-11 ans. Pauline a été touchée par une histoire d'amour incandescente. Christophe ne tarit pas d'éloges sur l'avant-dernier livre de Cormac McCarthy, Le Passager.

 

À prendre ou à laisser / Lionel Shriver

À prendre ou à laisser Par Laurence, bibliothèque Centre-Ville de Grenoble

Faut-il voir le verre à moitié plein ou le verre à moitié vide ?

A l'âge de 50 ans Kay et Cyril décident de se suicider ensemble le jour de leur 80 ans. C'est décidé ils ne seront pas une charge ni pour leur enfants, ni pour le N.H.S., le système de santé britannique. Le moment venu vont-ils respecter leur engagement ?

Lionel Shriver ne propose pas une mais douze solutions pour répondre à cette question. Tous les cas de figure sont ainsi étudiés : Un chapitre Kay accepte et Cyril refuse, un chapitre c'est le contraire, le suivant ils vieillissent ensemble ... Chaque choix aura ses conséquences.
C'est un roman souvent drôle parfois angoissant mais toujours juste.

 

Par Amélie, bibliothèque municipale de Vif

Et si...

Et si Kay et Cyril ne sautaient pas le pas, que se passerait-il ?

Après Quatre heures, vingt-deux minutes et dix-huit secondes (que j'avais adoré !), l'autrice américaine revient avec un roman sur le vieillissement et la fin de vie. Entre autres sujets d'actualité, car comme elle sait si bien le faire dans chacun de ses romans, Lionel Shriver dissèque notre société. Vous pensez que c'est ennuyeux ? Déprimant ? Pas du tout !
Et l'organisation originale des chapitres rend la lecture encore plus intéressante.

J'ai trouvé à ce roman un petit côté Matrix, lorsque Neo doit choisir entre la pilule rouge, qui révèle la Matrice, ou la pilule bleue, qui le ramène à son ancienne vie. Ici, Kay et Cyril peuvent choisir de prendre ou non le médicament, et nous découvrons les différentes conséquences de cette décision.

Les autres ne sont pas des gens comme nous / J. M. Erre

Les autres ne sont pas des gens comme nous

Par Miquel, bibliothèque municipale de Pont de Claix

Portraits grinçants

L’auteur du Mystère Sherlock et de La fin du monde a du retard revient avec un petit recueil de nouvelles cruelles et truculentes, parfois grinçantes, toujours drôles.
J.M Erre republie ainsi ses textes parus dans le magazine BD Fluide Glacial et c’est pour le mieux, sans cela nous serions nombreux à être passés à côté de ces quelques perles d’humour noir.

Une bonne porte d’entrée dans l’univers de cet auteur et tout simplement un bon moment garanti.

La Carte des confins - tome 01 / Marie Reppelin

La Carte des confinsPar Cécile, bibliothèque municipale de Saint Martin d'Hères

Magie et piraterie

Blake est un pirate de grande renommée qui a soif d'aventures, Callie est une voleuse hors pair qui semble fuir quelqu'un. Cette dernière se trouve être en possession d'un objet magique qui pourrait permettre au jeune homme de trouver l'objet de tous ses désirs.
Si leur rencontre semble au départ partir sur un mauvais pied, on se doute bien qu'un concours de circonstances amènera les deux personnages, dont on partagera les points de vue, à se recroiser, à apprendre à mieux se connaître et au final à s'apprivoiser. Leurs échanges sont parfois un peu lourds au commencement de leur relation - surtout du côté du pirate - mais cela s'arrange au fur et à mesure qu'elle s'approfondit.

A l'aventure et à la romance s'ajoute la magie qui terrifie le commun des mortels autant qu'elle les fascine. Tout cela nous donne la recette de ce fabuleux roman qui se révèle addictif et dont la fin suscite aussitôt l'envie de découvrir la suite dans le deuxième tome !

Angelica Varinen / N. M. Zimmermann

Angelica VarinenPar Myriam, bibliothèque municipale de Grenoble

Princesse détective

Entre roman policier et fantastique, Angelica Varinen s’adresse aux lecteurs de 9-11 ans. Accompagnée de son chat, de son renard polaire et de ses amies, la jeune princesse cherche la moindre occasion de sortir de son château et de partir aiguiser son sens de l’observation et de la déduction. Le roman est adapté aux jeunes lecteurs sensibles qui trouveront aventure et suspens dosés.

L’héroïne, bien que princesse, est intrépide et non conventionnelle. Elle ne manque pas d’humour et se soucie peu de salir ses robes. De quoi bousculer un peu les idées reçues et laisser libre cours à la fantaisie.

Qu'est-ce qu'on fout ici / Shaïne Cassim

Shaïne CassimPar Pauline, bibliothèque Centre-Ville de Grenoble

Insaisissable

Il est parfois difficile de parler des livres tant ils nous ont touchés ; ils restent insaisissables, infiniment beaux et complexes ; c’est le cas ici. L’amour qui se crée entre Patricia et Julian est incandescent : plus qu’une passion, c’est une rencontre comme il en existe qu’une dans la vie. Tous deux sont de grands sensibles : Patricia s’enfuit à vélo sur les chemins de montagne pour respirer, Julian surnage dans son quotidien en dépit de la "vague noire" qui menace souvent de l’engloutir. Et puis débarque cette flamme incandescente, petit feu redoutable, qui met à mal et sublime à la fois…

Pourrait-elle répondre à cette citation de Blaise Cendrars que Julian a tatoué sur le bras : "Qu’est-ce qu’on fout ici ? " ?

Le Passager / Cormac McCarthy

Le PassagerPar Christophe, bibliothèque municipale de Varces

Thalidomide Book

Le Passager de Cormac McCarthy (dont le prolongement Stella Maris est attendu pour mai) tourne autour d’Alicia et Robert Western, frère et sœur et platoniquement amoureux l’un de l’autre. Ce qui ne va pas. Ce qui ne pourra jamais aller.

Alicia, internée, a fini par se pendre. Le premier chapitre, d’une beauté gothique et envoutante, ouvre d’ailleurs le roman sur la découverte de son corps.

Robert a eu mille vies. De ses études scientifiques inachevées, en passant par la course automobile en Europe, jusqu’à ce métier de plongeur professionnel qu’il exerce quand nous faisons sa connaissance au début du livre. C’est lors d’une de ses plongées qu’il découvre au fond de la mer la carcasse d’un avion d’où il manquerait la boîte noire et un passager. Episode fantôme et inquiétant dont, semble-t-il, il n’aurait jamais dû avoir la connaissance. Robert se sent menacé. Et la mort autour de lui ne fait pas que roder. Et qui sont ces types en costumes sombres qui veulent lui mettre la main dessus ?

La partie thriller de cette histoire n’est pas une fausse piste en soi. Il n’y a pas de fausses pistes dans Le passager, mais parallèlement de multiples angles de prise de vue sur un frère et une sœur mais aussi sur leur pays, les Etats-Unis, à travers les convulsions de son histoire : la bombe atomique, Kennedy, le Vietnam.  Car il faut "qu’on prenne en compte les fondations du monde qui puise son essence dans le chagrin de ses créatures". Et inversement. C’est écrit dès la première page et comment faut-il le dire autrement.

Il n’y a pas que l’âme mélancolique et doucement putrescible de Robert. Le lecteur devra également composer avec la schizophrénie et les angoisses d’Alicia. Chaque chapitre s’ouvrant sur un freakshow paranoïaque, où le Thalidomide Kid en Monsieur Loyal mène d’une baguette sévère et perverse les délires hallucinatoires de la jeune femme. Pantomime psychiatrique alarmante (et contagieuse comme on le verra).

Disons-le, Le Passager ne se laisse pas apprivoiser facilement. Et s’il on est dérouté dans un premier temps, la règle proposée par Cormac McCarthy apparaît assez vite évidente. Car nous ne saurons pas tout. Et s’en accommoder, c’est s’en libérer. Un peu à l’image de ces longues conversations qui traversent le roman et dont les protagonistes et leurs propos m’ont apparu incontestables comme rarement dans la littérature, qu’elles soient absconses ou bouleversantes. Chaque personnage vous envahit d’une familiarité construite sur deux ou trois dialogues. C’est une prouesse d'écriture qui ne s’embarrasse ni d’esbroufe ni de frime comme seuls les auteurs qui n’ont plus rien à prouver peuvent se permettre.

L’épure du style et des intentions de Cormac McCarthy font du Passager un roman au-dessus de la mêlée, très impressionnant et déchirant.